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Histoire de Lo - Ivresses, Idéaux et Chaos Technique
17 avril 2020

Il était une fois en Confinement... (Le Rêve du Papillon, la Falaise de la Réalité et autres considérations)



« Zhuangzi rêva une fois qu'il était un papillon, un papillon qui voletait et voltigeait alentour, heureux de lui-même et faisant ce qui lui plaisait. Il ne savait pas qu'il était Zhuangzi. Soudain, il se réveilla, et il se tenait là, un Zhuangzi indiscutable et massif. Mais il ne savait pas s'il était Zhuangzi qui avait rêvé qu'il était un papillon, ou un papillon qui rêvait qu'il était Zhuangzi. Entre Zhuangzi et un papillon, il doit bien exister une différence ! C'est ce qu'on appelle la Transformation des choses. »

— Tchouang-tseuZhuangzi, chapitre II, « Discours sur l'identité des choses »  

 

Le-narcisse-noir-1

J'ai ici deux solutions.

Soit je choisis de propager quelque chose de réconfortant, de bon, mais de tellement fort émotionnellement que je risque de tanguer et de chuter à cause de mes propres émotions que je n'ai pas pris le pli de contrôler (comme le bruit de la cloche tout près des tympans). Parce que le Bon, le Beau et le Vrai sont aussi violents que la Réalité. Mais ils sont vitaux et salvateurs.

Soit je prends le même point de départ, mais je m'accroche à la corde (ou à la Mission de Vie), je ne me laisse pas tanguer à cause du bruit (les émotions). Je m'accroche à la corde, je répands ce qu'il y a à répandre, et j'attends que la cadence et le son s'apaisent... Avant de revenir à la réalité pour mieux l'affronter. Ou la convertir en Grand Mieux. 

15 avril, 19 heures 42 :

Confinement prolongé au moins jusqu'au 11 mai prochain.  Pendant ce temps, mis à part les choses habituelles, je plonge dans la contemplation totale, je rêve de mon appartement en navire sur la mer de l'incertitude planétaire... Mais mon navire est à quai pour cause de ravitaillement à venir... En attendant de repartir, de voguer en rond.

Je suis à mon bureau, avec une soupe poireaux/patates/chou vert à écrire cet article. Au moins deux choses que je veux plus dynamique que ma personne durant toute cette journée...

(Mon Higher-Self : - Eh cocotte, te plains pas, t'as trouvé la force de faire une soupe ! MOI :- Oui mais c'est parce que j'ai la flemme de cuisiner mes légumes en ce moment. Du coup je fais des soupes, des jus,... Pas envie de cuisiner, et je vais pas faire appel tous les jours à Deliveroo pour bouffer. J'ai un gros coup de barre, mais j'suis loin d'être une feignasse. Merci de ta compréhension.) 

Boire, beaucoup. des jus, des soupes... ça sent la détox proche.

D'autant plus que suite à l'allocution de lundi dernier au soir, aucun festival ne pourra se tenir jusque mi-juillet aux dernières nouvelles. Celui où je devais aller en tant que bénévole a été annulé, et c'est finalement un soulagement plus qu'une déception. Pas la tête à faire la fête au vu de plusieurs circonstances, diverses et variées. Aussi bien liées à la pandémie qu'à un changement personnel en moi, progressif. 

Mercredi dernier, je me suis sentie silencieusement explosée, ma tête pleine d'images comme un zapping infernal. Du mal à me concentrer, envie de bouger dés que ce sera possible. 

N'empêche, j'y pense mais rouvrir les écoles au fur et à mesure dés le 11 mai... Alors qu'on sait que les maternelles, écoles, crèches, et compagnie, ce sont de véritables foyers de contamination. Et tout ce qu"il va falloir configurer que les plus jeunes ne comprendront pas (distanciation sociale, port du masque...etc...). On est pas en Asie où il existe une véritable culture/politique sanitaire. Les japonais ont cette culture, les taïwanais... Parce que dans leur culture, la communauté, le groupe priment sur l'individu. Ils ont des exercices et des méthodes de prévention pour pratiquement tout, des pandémies aux catastrophes naturelles. En Occident, on ne comprend pas cette necéssité de préserver la communauté, on est accrochés jusqu'à l'extrême au principe fondamental de liberté individuelle. 

Nous avons retenu la Liberté de chacun(e). Nous avons retenu l'Egalité pour râler sur nos vies précaires (en grande majorité) et avoir envie de couper des têtes (avec des causes plus ou moins légitimes). Nous avons retenu la Fraternité pour nos causeries idéalistes en groupe, mais les plus fraternels agissent en solitaire, sans impulsion extérieure ou de masse... 

Oui, le confinement est en train de faire évoluer quelque chose en moi. Je gagne en lucidité que j'aiguise comme une lame. J'exige de moi-même toujours plus de lucidité, de conscience, mais aussi de créativité, de résistance progressive à la peur, au dogmatisme... Je ne veux plus avoir peur, moi qui ai grandi en partie avec des images douloureuses dans la tête. Grandi avec de la résistance extérieure au raisonnement, à l'intellect, à quelque chose de poussé. J'y reviendrai plus loin. 

 

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16 avril, 23 heures 40 :

Me sens un peu moins speedée. De quoi boire (un cappucino, un sirop une tisane... L'embarras du choix, j'aurais presque pu ouvrir un troquet clandestin avec invités rigoureusement sélectionnés), un orgasme à 19 heures 15, et ça repart... Et ça reste vachement utile quand t'as des sextoys et que t'as un petit coup de barre, quitte à attendre un quart d'heure avant de te lever un peu plus en forme.... 

Bref, comment gérer son confinement quand on est seule chez soi (je dis ça mais c'est plus que relatif. Mon coeur est rempli, et cela me comble autant qu'un orgasme en solo)...

Autrement, que dire... Baklava. Makroud. Cornes de gazelle. Briouates. Synonymes pour la majorité des gens qui les goûtent pour la première fois de douceurs orientales très (voire trop) sucrées qu'ils ne savent pas faire, quand d'autres remueraient ciel et terre pour trouver/connaître un épicier/traiteur ou paieraient une voisine/copine/belle-soeur arabe pour un plateau entier. Sur ces quatre patisseries, je sais faire les deux dernières. 

Pourquoi je pense à cela ? Peut-être mon vague héritage...
Je pense au Maroc, j'ai mes raisons en dehors du fait que ça doit être magnifique et que j'aimerais pouvoir voir un jour ce pays de mes yeux.
Je continue d'écrire avec un fond sonore de musique gnawa... Besoin de sortir des choses qui ont du mal à sortir.

17 avril, 01 heure 28 :

Ma rédaction commence à ressembler à un accouchement difficile. 
Je regarde ce ventre qui est le mien, et je cherche alors une symbolique à pourquoi ce ventre, pourquoi cette rondeur... Et je tombe sur cette partie d'article qui explique les causes psychologiques du surpoids : 

"Chacun rencontre dans sa vie des difficultés. Certaines sont inévitables et, à vrai dire, quasi-nécessaires, d’autres apparaissent comme accidentelles. Les difficultés que le petit homme rencontre obligatoirement dans son évolution peuvent être schématisées autour de 3 grandes étapes qui lui permettent de parvenir à sa structure psychologique définitive.

LA PREMIÈRE EST L’ÉPREUVE DE LA RÉALITÉ,

... qui survient au cours de la première année de la vie. Il nous faut en effet reconnaître que le monde existe en dehors de nous, que le corps de la mère (ou du personnage maternel), existe aussi en dehors de nous, de même que nous ne sommes pas que son prolongement. Certains sujets se vivent en effet comme ne s’appartenant pas et dès lors ne peuvent ressentir et exprimer aucun désir propre sans en référer à la mère ou plus tard, à son substitut : épouse ; conjoint ; collègues et même enfants. A défaut de trouver la voie qui les mène à leur propre désir, ils restent rivés au désir de l’autre, lui demandant même ce qu’ils ressentent. Cette difficulté à se vivre comme autonomes peut les amener à rester fixés, non seulement au premier objet d’amour, c’est-à-dire à la mère, mais aussi à ce qu’elle symbolise, c’est-à-dire la nourriture. Celle-ci pourra colmater, plus tard, tous les désirs insatisfaits : non seulement le besoin de s’alimenter, mais aussi et surtout la tristesse, la colère et toute forme de manque vécue comme insupportable.

Du manque au désir.


Pourtant, c’est bien le manque qui permet d’accéder au désir. Si nous ne sommes pas capables d’attendre, de temporiser nos pulsions, si nous voulons du « tout, tout de suite », alors nous risquons de nous précipiter sur l’objet toujours disponible, toujours consommable, toujours agréable - à savoir la nourriture - sans pour autant accéder à notre DESIR authentique.
Sans la capacité d’élaborer nos pulsions fondamentales, la vie relationnelle, amicale, amoureuse reste pauvre et insatisfaisante et le recours systématique à l’objet-nourriture va progressivement dégrader notre propre corps et l’image que nous en avons au point de détruire davantage notre vie relationnelle.
Ainsi, les sujets qui, en raison d’un environnement familial précoce insatisfaisant n’auront pas pu franchir de façon heureuse cette première étape resteront fixés à l’objet-nourriture. Ou bien, à l’occasion de difficultés existentielles ultérieures, ils régresseront vers ce premier mode de fonctionnement qui se fait sous le signe de l’urgence, de la violence et de l’impulsivité, comme les troubles du comportement alimentaire dont ils souffrent et se plaignent.
On comprend dès lors que seul un travail psychologique en profondeur puisse leur permettre de retrouver le manque, qui leur manque pour accéder à un désir autre qu’alimentaire. Mais ce travail exigera un engagement sur un temps long (qu’il faut chiffrer en années) et qui leur imposera de supporter des frustrations, première étape de la découverte du manque… qui pourra un jour s’élaborer en désir propre.

LA DEUXIÈME EST L’ÉPREUVE DE LA SÉPARATION

Quand la mère (ou le personnage maternel) s’éloigne pour la première fois, le jeune enfant éprouve un sentiment de désarroi ou d’abandon. Il ne vit plus dans la fusion primitive et son babillage va se transformer. Au début, ce ne sont qu’onomatopées, puis viennent les paroles et le langage destinés à appeler celle qui manque.
Ce manque est indispensable à l’accès au langage, première étape de la pensée symbolique. Le symbole, de manière générale, peut être défini comme ce qui rend présent ce qui est absent. Le jeune enfant, en appelant sa mère (me ; ma ; mama ; maman) présentifie sa mère alors qu’elle n’est plus là. Le mot remplace la « chose », en quelque sorte.

Mère présente, mère absente, mère gavante.
On conçoit que si la mère est (presque) toujours présente, l’enfant n’éprouvera pas le besoin de mettre en mots son manque. A l’inverse, si la mère est (presque) toujours absente, le manque est considérable, et l’enfant restera avide et vorace, comme si la nourriture pouvait remplacer la présence humaine, affective et chaleureuse de celle qui manque. Enfin, si la mère répond à toute demande de l’enfant (que celle-ci soit liée à la faim, mais aussi à la soif, au sommeil, à une demande d’amour ou de câlins) par le don de nourriture, l’enfant engrammera la réponse-nourriture comme capable de colmater tous ses besoins, désirs, affects. Mère trop présente, mère absente, mère gavante, voilà une typologie schématique des mères inadéquates qui ne permettent pas le repérage des sentiments à travers la grille conceptuelle du langage.

Court-circuit de l’affect.
En même temps, les mauvais apprentissages aboutissent à un court-circuit du manque et du désir. Si la séquence comportementale normale peut s’écrire : Besoin —> manque —> désir —> objet —> plaisir, les sujets pour lesquels l’objet reste toujours présent chercheront à toucher la prime de plaisir en court-circuitant le manque et le désir. Ce court-circuit de l’affect s’accompagne aussi du manque du mot pour désigner nos états émotionnels. Certains individus apparaissent ainsi comme des invalides de l’affect, comme des alexithymiques (a : privatif ; lexis : le mot ; thymique : émotion) c’est-à-dire comme incapables de trouver les mots pour dire leurs émotions, faute sans doute d’avoir connu un apprentissage satisfaisant.
Parallèlement, les sujets qui n’auront pu dépasser cette épreuve de séparation resteront plus ou moins rivés à l’autre, la mère mais aussi le père, les collègues ou même l’activité professionnelle, autant d’éléments capables d’assurer leur cohésion et leur stabilité. Qu’un maillon manque ou se dérobe et c’est le risque dépressif qui apparaît dans toute sa force.
On conçoit que des sujets qui auront mal vécu le temps de l’apprentissage du manque redoutent, plus que tout, le risque de manquer et se réfugient dans l’excès, le tout-tout de suite, de crainte de n’avoir rien, de n’être rien.
Là encore, la prescription d’un régime sans travail psychologique d’accompagnement ne peut amener qu’à l’échec."


Je sais que c'est un peu long à lire et un peu technique (bah oui, c'est de la psychanalyse...) 

Je regarde mon ventre que oui, je hais. Que parfois oui, je comprends, mais que je n'arrive pas à aimer, parce que plusieurs causes s'entrechoquent. 

Ma mère si présente, parfois trop présente. La Mère qui submerge, parfois, comme la Mer, quand bien même ce serait involontaire. Comme le tsunami en Asie du Sud-Est en décembre 2004. Ma mère qui m'aime, que dis-je qui m'adore, mais dont l'adoration m'étouffe quelques fois. 

J'imagine ma mère, son ventre rond au fur et à mesure de la grossesse. Le stress, l'angoisse durant la grossesse. Mon père qui me refusait dés le départ. L'IVG à laquelle j'ai échappé. Ma mère qui me garde dans son ventre. Et le mien, et si ce que je garde sur mon ventre, c'était juste des idées, des envies, des potentiels que j'aurais peur de perdre, de sacrifier au nom du jugement extérieur qui me terrorise et auquel je coupe court quand l'occasion m'est donnée ? 

Comme si j'étais enceinte de mon potentiel, de mon meilleur Moi. Comme si j'avais peur de m'accoucher, de faire naître ce meilleur Moi. Troublant. Pendant longtemps, c'est comme si je n'avais pas été présente en moi-même, dans mon corps. Et maintenant, enfin, depuis six ans que je commence peu à peu à me réapproprier mes chairs, mon corps, ce qu'il provoque de rejet ou de désir, je me rends compte de là où ça coince. Car ce qu'on attend de moi, ce qui est encore plus fort que le désir dans le regard des personnes qui tiennent à moi, ce n'est pas tant absolument mon corps que ce qu'il retient. Accoucher de tout ce potentiel, toute cette créativité.

Comme un taux vibratoire qui attend de remonter désespérément. Et de remonter, par là où normalement ce serait à priori impossible de le faire. 

Je pourrais retirer plein de réflexions et déductions de cela, mais je n'aime pas me dépécher de faire les choses si c'est pour les rater complètement. Pareil pour le fait de réfléchir, j'apprends à y aller même si c'est très dur et que j'aime souvent connaître rapidement une conclusion sérieuse et qui me serve vraiment. Ne pas savoir tout d'un coup, mais savoir au fur et à mesure, est aussi un marqueur de patience et de bonne valeur , à ce qu'on m'expliquait il y a peu. 




En début d'article, j'évoquais le rêve de Zhuangzi.

Je vous rassure sur le fait que je ne compte pas théoriser des heures sur ce texte. Mais en partant du principe que chaque Vie a ses avantages et ses contraintes, qui est le plus sage de rêver de la condition de l'autre ? Le papillon, ou Zhuangzi ? Qui est le plus libre finalement ? 

Rêver d'une autre condition quand la nôtre a de bonnes raisons d'être enviée, ne serait-ce pas une frustration inutile ? 

Sur cette idée de méditation, je vous souhaite une bonne fin de semaine et je vous reviens très vite. 
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  • Chroniques d'un monde bordélique à hauteur humaine, trop humaine. Guerillera de salle de garde. Consultante en Ambivalence et Ironie auto-défensive. Et sinon je peins. (IG : lobazaar_gallery)
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